mardi 30 avril 2013

Quatre brise-glaces japonais




Le Japon possède trois bases scientifiques antarctiques (Showa - 69°00'S / 39°35'E aux îles Ongul  -, Mizuho - 70°42'S et 44°20'E, 2 230 mètres d'altitude, à 270 km dans le sud-ouest de Showa - et Asuka - 71°32'S et 24°08'E, 930 mètres d'altitude, à 670 km dans le sud-ouest de Showa-). Dans le but de ravitailler ces stations, le Japon a utilisé successivement quatre brise-glaces.


Soya
Rien ne prédestinait celui qui fut le premier brise-glace nippon à naviguer en Antarctique, ni à porter le pavillon japonais, ni à être un navire scientifique… Lancé à Nagasaki en 1938 sous le nom de Volochaevets, ce cargo à coque renforcée pour naviguer en eau glacée fait partie (avec ses deux sister-ships Bolshevik et Komsomolets) d'un accord commercial passé entre l'URSS et le Japon. C'est ainsi que le Japon pense financer partiellement son achat d'une ligne de chemin de fer en Mandchourie. Mais le climat international est tendu à cette époque, l'accord est rompu et le navire livré à une compagnie japonaise, la Tatsunan Kisen Co. sous le nom de Chiryō Maru. Réquisitionné en novembre 1939 par la marine impériale, il prend le nom de Soya en février 1940 et est utilisé comme bâtiment auxiliaire. Après une guerre durant laquelle il est plusieurs fois attaqué par les forces américaines, il est utilisé pour le rapatriement des habitants japonais des territoires perdus puis comme ravitailleur. En 1956, en prévision de l'expédition polaire qui doit avoir lieu l'année suivante, le navire est transformé, recevant de nouveaux moteurs, un pont pour hélicoptères et diverses installations. C'est lui qui emportera le matériel destiné à la création de Showa, la première base permanente japonaise en Antarctique en 1957. C'est également lui qui recueille en 1958 le personnel japonais qui avait du être laissé sur place l'été précédent. L'épisode a été rendu célèbre par le film "Antarctica" et l'histoire des chiens Taro et Jiro qui seront retrouvés un an plus tard, attendant le retour de l'été et donc de l'homme, est particulièrement émouvante. Il servira par la suite de brise-glace de sauvetage avant d'être retiré du service en 1978. Depuis 1979, il est exposé au Museum of Maritime Science de Tokyo.


Déplacement : 3,800t (1944) / 4,100t (1978)
Longueur : 77.5m (1944) / 83.3m(1978)
Largeur : 12.8m (1944) / 13.5m(1978)
Propulsion: moteur vapeur VTE , 2 chaudières / moteurs Diesel
Vitesse : 12,4 noeuds

AGB 5001 Fuji (1965)

Le brise-glace Fuji a été lancé le 18 mars 1965 et livré au mois de juillet de la même année par le chantier de Tsurumi afin de remplacer Soya, éprouvé par de longues années de service. Après vingt années de service, il est accueilli au port de Nagoya et y devient musée flottant qui retrace l'aventure japonaise polaire.


Déplacement : 8 838 t
Longueur : 100 m
Largeur : 22 m
Puissance : 4 x 3 500 CV à 600 tours/mn
Vitesse : 17 noeuds.


AGB-5002 Shirase (1981)

Le troisième brise-glace à porter le pavillon du soleil levant a été lancé en décembre 1981 et entra en service en novembre 1983. Il fut utilisé au cours de 25 expéditions antarctiques puis retiré du service en juillet 2008. 



Aucune proposition n'ayant été jugée satisfaisante quant à sa reprise, sa démolition fut décidée en octobre 2008 mais un mouvement populaire se dessina pour la sauvegarde de ce bâtiment. Finalement, le projet de la compagnie Weathernews Inc. fut adopté par le gouvernement le 9 novembre 2009 et le navire lui fut transféré le 11 février 2010. Au port de Funabashi, il devient à la fois musée et centre d'information sur les modifications climatologiques. A la suite du tsunami de Fukushima, il reprendra la navigation pour rejoindre en juillet 2011 le port de Onahama (à proximité du lieu de la catastrophe) et participer à des opérations de prévention de ce genre de phénomènes.



AGB-5003 Shirase (2008)

En raison des difficultés économiques que connaît le Japon depuis plusieurs années, le renouvellement du brise-glace, évoqué dès 2003, est reporté à plusieurs reprises. Enfin, le second navire à porter le nom de l'explorateur peut être lancé par l'Universal Shipbuilding de Maizuru en avril 2008. Ses dimensions et ses capacités à briser la glace sont plus grandes que celles de son prédécesseur. 



Il effectue son voyage inaugural en novembre 2009. Voir des clichés de l'actuel Shirase et de ses emménagements intérieurs. 



Le lieutenant Nobu Shirase (1861-1946)
Deux des brise-glaces d'exploration japonais portent le nom de celui qui fut le premier Japonais à explorer l'Antarctique.



Lorsque le lieutenant Nobu Shirase annonça son projet de lancer une expédition vers le pôle Sud, peu de gens au Japon comprirent l'intérêt d'une telle mission, encore moins croyaient à son succès. Mais, grâce au soutien de l'ancien Premier ministre, le comte Okuma, Shirase peut achever ses préparatifs. La première expédition antarctique japonaise quitte Toyko le 1er décembre 1910 à bord du Kainan Maru, un petit navire d'une trentaine de mètres de long. 



Après une escale à Wellington, c'est le vrai départ pour tenter d'atteindre le pôle. Immédiatement, les mauvaises conditions météorologiques s'opposent au projet nippon et forcent l'expédition à rebrousser chemin vers Sydney, atteinte le 1er mai 1911. L'accueil y est hostile. La presse locale se moque, la population observe les Japonais comme des bêtes curieuses. "Atteindre le pôle avec un si petit navire ? Ridicule !". Heureusement, l'intervention d'un universitaire de Sydney, Pr. Edgeworth David, qui avait accompagné Shackleton en 1907 améliore l'ambiance locale. Mais ces événements ont retardé l'expédition. Il est maintenant hors de question d'atteindre le pôle avant Amundsen ou Scott. Shirase quitte Sydney le 19 novembre, mais il ne s'agit maintenant plus que de réaliser des travaux d'exploration et quelques expériences scientifiques pour lesquelles Shirase a choisi King Edward VII Land. Ceux-ci seront limités par les conditions toujours mauvaises. Néanmoins, lorsque Shirase accostera à Yokohama le 20 juin 1912, l'accueil fut celui que méritait ce premier Japonais à tenter l'expédition du pôle sud.


Tous clichés Wikimedia


Voir le livre "Navires spécialisés" 

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